Les animaux du jardin Guinguette
N°1 -Chatte de jardin.
Cette page est dédiée à Guinguette la petite chatte mascotte actuelle du jardin

Le chien pense : « Les hommes me nourrissent, me protègent, m’aiment, ils doivent être des dieux. »
Le chat pense : « Les hommes me nourrissent, me protègent, m’aiment, je dois être leur dieu. » (anonyme) autrement dit : « les chiens ont des maîtres, les chats ont des esclaves »
Quelques sentences d’amoureux des chats :
« J’aime les chats parce qu’il n’existe pas de chats policiers. » a dit Jean Cocteau.
« Il y a deux moyens d’oublier les tracas de la vie : la musique et les chats » : Albert Schweitzer.
« Le plus petit des félins est une œuvre d’art ». Léonard de Vinci
Baudelaire les décrit amoureusement dans « Les chats » :
Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s’endormir dans un rêve sans fin ;
Leurs reins féconds sont pleins d’étincelles magiques,
Et des parcelles d’or, ainsi qu’un sable fin
Etoilent vaguement leurs prunelles mystiques.
Et aussi dans son autre poème « Le chat» :
Viens, mon beau chat, sur mon cœur amoureux ;
Retiens les griffes de ta patte,
Et laisse moi plonger dans tes beaux yeux,
Mêlés de métal et d’agate.
Les origines du chat remontent à loin. Le chat sauvage apparait au quaternaire issu d’une longue lignée de félidés. On peut penser que la sédentarisation des humains, le développement de la culture des céréales et la construction de silos pour y stocker les récoltes engendrant la prolifération de rats a permis le rapprochement entre l’homme et le chat et son apprivoisement (apprivoisement et non domestication comme pour le chien).
Une découverte à Chypre, sur le site de Sillourokampos, prouve que nos chers petits matous étaient déjà apprivoisés 7000 ans avant Jésus-Christ.
C’est une équipe de chercheurs français, dirigée par Jean Guilaine, professeur au Collège de France qui a découvert les ossements d’un Felis silvestris lybica (chat sauvage qui est l’ancêtre de nos félins domestiques actuels) dans une fosse, disposés en parallèle avec ceux d’un homme, démontrant une volonté symbolique de les lier tous deux dans l’au-delà, prouvant leur lien spécial.
Le chat était vénéré en Égypte et avait même un dieu à son image : la déesse Bastet ou Bast, au corps de femme et à la tête de chat qui était protectrice de la maison, gardienne de la santé, associée à la fécondité et aux récoltes. Personnification de la lumière et de la chaleur la déesse Bastet était la divinité la plus aimée du peuple. Mais attention sous sa forme à tête de lionne la déesse devient la redoutable Sekhmet Dans le Livre des Morts le chat combat le serpent Apophis et lui tranche la tête. Bastet a aussi l’estimable privilège magique de stimuler le plaisir charnel. Le chat en tout cas protégeait effectivement très bien les greniers et silos à grains des rongeurs pullulant dans la vallée du Nil . Il chassait aussi les serpents. Ce chat descendrait du chat sauvage africain.
La momification des petits félins prenait même une allure industrielle si on en juge les cimetières de chats retrouvés. On vendait sculptures et amulettes au temple de Bubastis en Basse Égypte et on y sacrifiait des chatons élevés en quantité pour fournir des momies bénéfiques. Malheureusement au début du 19e siècle des industriels anglais ont transportés certains de ces amas de momies en Angleterre pour en faire de l’engrais pour leurs champs (apport d’azote , potasse et phosphore). Le grand égyptologue français Mariette s’en indigne en vain. Dans la même veine les Anglais ne se sont pas gênés non plus pour récupérer les ossements des soldats et des chevaux napoléoniens enterrés dans des fosses communes à travers l’Europe. En 1847, dans son recueil Choses vues, Victor Hugo s’en indigne: «Ainsi dernier résidu des victoires de l’Empereur: engraisser les vaches anglaises!».Cupidité !( Leprincipe de la fertilisation des champs a été mis en lumière au 19e siècle, par l’agrochimiste allemand Justus von Liebig par ailleurs inventeur en 1853 du bouillon Liebig, marque toujours actuelle spécialisée dans les soupes).
En pays musulmans le destin du chat a été plus heureux qu’en Europe chrétienne . Selon de nombreux hadiths Mahomet interdit la persécution et le meurtre des chats. D’après la légende, le chat d’Abou Huraïrah, un compagnon du Prophète, a sauvé Mahomet d’un serpent. Dans sa gratitude, Mahomet a caressé le dos et le front du chat, bénissant ainsi tous les chats. Sa chatte s’appelait Muezza.
En Europe son destin avait bien commencé. Les Germains imaginaient la déesse Freya (ou Freyja) déesse de la fertilité, la Dame (voir Frau en allemand), dans un chariot tiré par deux grands chats offerts par Thor. Le chat est aussi implanté en pays celtiques. Le héros irlandais Cuchulainn dans « Le festin de Bricriu » rencontre trois chats druidiques.
En extrême Orient il est aussi apprécié. Au Japon le temple bouddhiste Go To Ku Ji de Tokyo est consacré aux chats. Toutefois certains bouddhistes le considèrent come un être indifférent qui s’est endormi quand Bouddha est entré en Nirvana. C’est aussi un hypocrite (voir notre chat-fourré).

Le Moyen âge occidental chrétien est beaucoup plus tragique pour ces petites bêtes qui cumuleraient des défauts. Les chats sont paresseux, dormant tout le jour et ne chassant que la nuit dans un monde inquiétant de ténèbres. Il est lascif ayant un grand appétit sexuel à la période de reproduction. La pupille de ses yeux est verticale comme celle des vipères. Il choque la morale. Le chat est considéré comme hypocrite et gourmand.
Le noms des hérétiques cathares et du chat (cattus en bas latin) sont rapprochés phonétiquement (cathare vient en fait du grec katharos : pur et n’a rien à faire avec le chat). On raconte que les cathares vouent un culte à un gros chat noir, le diable déguisé. Plus tard les templiers sont accusés du même péché.
Bien sûr les moines élevaient des chats pour se protéger des rongeurs comme à la Grande Chartreuse en Isère créée en 1084. Il ne faut pas oublier que la fourrure du chartreux (je parle ici du chat et non du moine, était appréciée. La fourrure de chat est toujours vendue (voir les tanneurs suisses et surtout les élevages en Chine où divers animaux sont élevés dans des conditions abjectes).
Le chat est associé à la sorcellerie surtout s’il est noir. Le rapprochement femme et chat est habituel. L’image de la sorcière et du chat noir est une constante. Les deux hantent les sabbats. Il aurait neuf vies et le matagot ramènerait des pièces d’or à son maitre.
Le 13 juin 1233 le pape Grégoire IX (vers 1145-1241) édicte la bulle « Vox in Rama » contre la sorcellerie. Cette bulle considère le chat, de même que le crapaud, comme une incarnation du Diable. Le pape décrit un chat noir « aussi gros qu’un chien de taille moyenne », dont l’anus était embrassé par tous les présents, chacun à son tour, en commençant par le nouvel initié. Puis les lumières étaient éteintes et une orgie s’ensuivait. Que de fantasmes ! Par ailleurs ce pape instaure l’inquisition en 1231.

Mais en 1347 des rats provenant de Caffa comptoir gênois en Crimée assiégé par les Mongols débarquent à Marseille porteurs de la peste noire qui fait périr plus du tiers de la population européenne. La maladie est propagée par les puces que le rat transporte.
Le pape Innocent VII pape de 1404 à 1406 demande l’éradication des chats
En 1484 encore Innocent VIII impose que les « sorcières » soient livrées par l’Inquisition au bûcher avec leurs félins favoris. bulle « Summis désirantes affectibus ».
Le roi Arthur (« Estoire de Merlin ») combat un chat le Chapalu, petit chat noir qui devient énorme et monstrueux. Cette métamorphose d’un chat noir apparait souvent dans les contes.
On ensevelissait aussi vivants les chats pour assurer la solidité des bâtiments comme au château de Combourg de Chateaubriand). On les précipitait d’une tour comme à la Kattefeest d’Ypres en Belgique et surtout on les brûlait notamment à la Saint Jean d’été le 23 juin un peu partout en Europe selon des pratiques diverses.
Toutefois le bon peuple se régale dans le roman de Renard des aventures du goupil et de Tibert le chat.
Mais les choses changent. Le poète Du Bellay ( 1525-1560 ) pleure son petit chat gris Belaud. Léonard de Vinci aime ces félins :
Richelieu et Colbert aiment leurs chats. En 1697, Charles Perrault (1628-1703) crée le sympathique Chat botté. Colbert ministre de Louis XIV décrète qu’il doit y avoir au moins deux chats sur les bateaux marchands pour limiter le nombre de rats bruns porteurs de peste.
La Fontaine fait du Grippeminaud un sujet de fable : « Le chat, la belette et le petit lapin » et « Le vieux chat et la jeune souris » ou le chat s’appelle Raminagrobis comme chez Rabelais.
Mme d’Aulnoy écrit le conte « La chatte blanche » en 1697.
Au 18e siècle Louis XV interdit de brûler des chats à la Saint Jean à Paris en place de Grève.
Le chat inspire les peintres depuis la Renaissance, et ce en pleine période de chasse à la sorcière. Et il conquiert les Amériques avec les colons européens. Le musicien Scarlatti (1660-1725) dédie à sa chatte une Fugue. C’est le précurseur de Moussorgski et de Stravinsky « Berceuses du chat ».
Au contraire de ses lointains prédécesseurs le pape Léon XII aime les chats et promet à Chateaubriand de lui céder son chat Micetto à sa mort (Mémoires d’Outre tombe).
Avec le 19e siècle commence l’âge d’or des chats. Baudelaire, qui les adorait en laissa un portrait amoureux dans « Les Fleurs du Mal » (1857) : en deux poèmes« Le chat » et « Les chats ». Théophile Gautier est aussi un grand amoureux des chats (« Ménagerie intime » (1869). Tchaïkovski avec Marius Petipa met en scène la chatte blanche dans le ballet « La Belle au bois dormant ».

Le chat noir lui-même est réhabilité et devient l’emblème d’un célèbre cabaret montmartrois, symbole de la vie de bohème que chante Aristide Bruant :
« Je cherche fortune
Autour du chat noir
Au clair de la lune
A Montmartre le soir ».
Mais le chat risque toujours d’être mangé car « C’est la mère Michel qui a perdu son chat ». C’est pourquoi les chats restent sur leurs gardes :

Colette adore les chats et surtout sa chatte blanche Kiki la doucette (voir La Chatte – 1933).
Toutefois les folkloristes qui relèvent les contes et légendes dans les campagnes dans la première moitié du 20e siècle notent encore souvent des histoires où le chat noir a une connotation maléfique. Seule la chatte blanche ou tachetée de blanc a un rôle bénéfique.
Cette angoisse se ressent encore dans la chanson de Fréhel « La peur (un chat qui miaule » (1935).
Mais actuellement le chat a le vent en poupe. Il n’est que de le voir trôner sur internet. La bande dessinée féline explose depuis Félix le chat d’Otto Messmer créé en 1919 et Tom et Jerry créé en 1940 par William Hanna et Joseph Barbera, Le chat du rabbin (2002) de Johann Sfar. A pour modèle Imhotep le chat de l’auteur. C’est un chat qui parle depuis qu’il a mangé le perroquet du rabbin.
Ce sont des animaux sympathiques au contraire des chats de Maus (souris en allemand) où les chats sont des nazis qui exterminent les souris juives, les Polonais étant des cochons.
Au cinéma Fritz le chat (1972) est un film culte des années 1970, très contre-culture et pas pour enfants. Laissons les bambins jouer à chat perché en attendant qu’ils grandissent tout en suivant depuis 1945 dans les Looney Tunes, l’inusable Titi et Grosminet (Tweety & Sylvester).
Félicette nommée d’après Félix le chat est la première chatte lancée dans l’espace en 1963 dans le cadre du programme spatial français. Cocorico, mais la fin est moins drôle, la chatte est euthanasiée deux mois après son retour pour examen de son cerveau.
La chanson n’est pas en reste depuis, en vrac, « Le petit chat est mort » de Renaud « Le chat de la voisine » de Montand, « Un chat de Paris » des Trois Ménestrels, la comptine « Trois p’tis chats, chats, chats, chapeaux de paille… », « Jean-Philibert » de Maurane, « Brave Margot » de Brassens, « Le p’tit bout de la queue du chat » des frères Jacques, etc.
Et la chatte est toujours liée à la femme comme le démontre pour les adolescents le succès de Catwoman dans Batman.
Bref le chat a une belle carrière devant lui et, espérons le, heureuse. Et comme le dit l’artiste belge Philippe Geluck.

André MAUDET